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RESEARCH PRODUCT

Souffrance, jugement moral et « société addictogène » : les registres de sens du traitement de la dépendance

Line Pedersen

subject

adictologíaSocial Sciences and HumanitiestreatmentApplied MathematicsGeneral Mathematics05 social sciencesaddictogenic society06 humanities and the artsevaluación moralAddictologietraitementsociedad adictogénica060104 historysouffrance psychiquesociété addictogènesufrimiento psíquicotratamiento0502 economics and businessmental sufferingmoral evaluation0601 history and archaeologySciences Humaines et Socialesévaluation moraleAddictology050203 business & management

description

Cet article explore la teneur de l’évaluation morale dans les modes de traitement du « trouble addictologique » en s’intéressant aux trajectoires des personnes en prise avec des produits psychoactifs inscrites dans une démarche d’arrêt ou de diminution des consommations d’alcool ou des drogues illicites. En suivant ces trajectoires de sortie, j’ai pu questionner leur passage dans deux entités de traitement, les Centres de Soin, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) et les groupes d’entraide associatifs (Vie Libre, Narcotiques et Alcooliques Anonymes). À partir d’une posture ethnographique, à la fois compréhensive et critique, nous explorons la construction de la « sortie » des addictions au regard des contraintes morales, sociales et institutionnelles. L’article se fonde sur des données de recherche recueillies de 2010 à 2013. Elle combine à la fois l’observation directe des milieux, ainsi que des entretiens biographiques et semi-directifs réalisés avec des intervenants (nb 15) et des personnes dépendantes (nb 41).L’analyse qualitative de données met en évidence que le travail biographique déployé par les personnes dépendantes permet une mise à distance de l’expérience de l’emprise. Il s’agit de constituer un jugement moral sur ses comportements passés sous l’effet des produits. La catégorie de trajectoire de déprise permet donc de rendre compte des formes subjectives de (se) composer avec ou sans les produits sans renvoyer à l’idéal d’abstinence. C’est seulement au moment de la mise en récit devant les pairs ou les professionnels que l’on peut parler d’une rupture biographique. En ce sens les entités médiatisent les récits des personnes dépendantes, parce qu’elles contribuent à construire un cadre d’énonciation des récits, et donc de distinguer ce qui peut être dit ou pas. Cet article interroge l’aspect contraignant de ce processus, en ce sens que l’obligation de se raconter participe aussi à construire un sujet moral capable de s’autocontrôler.

10.7202/1059141arhttps://doi.org/10.7202/1059141ar