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La fonction auctoriale dans la sémiotique textuelle d'Umberto Eco
Nicolas Bonnetsubject
[ SHS ] Humanities and Social Sciencesauteur écrivain sémiotique littérature[SHS] Humanities and Social Sciences[SHS]Humanities and Social Sciencesdescription
International audience; En 1979, Umberto Eco publie en Italie Lector in fabula où il expose les principes de sa sémiotique textuelle. Dans cet ouvrage, le sémioticien distingue nettement deux couples de termes : d’un côté, les figures de l’auteur et du lecteur « empiriques » ; de l’autre, celles de l’auteur et du lecteur « modèles» qui sont, à la différence des premiers, des fonctions inscrites dans le discours.Conformément à la doctrine de la lecture immanente ou close reading, le sémioticien postule que l’interprète n’a pas à se soucier des conditions de production du texte. L’Auteur Modèle (la stratégie textuelle) est bien une création de l’auteur empirique, mais les procédures par lesquelles celui-ci élabore celui-là restent étrangères aux enjeux de l’interprétation. Ainsi, le sémioticien qui invite le lecteur à suivre les sentiers tracés par l’Auteur Modèle dans « le bois narratif » s’interdit-il toute excursion dans la biographie de l’auteur empirique, au nom de la rigueur méthodologique. Admettons que la valeur de l’information biographique soit nécessairement nulle du point de vue heuristique, ou pire, qu’elle contribue à distraire le lecteur de l’essentiel, car ce que le texte exprime est irréductible aux vicissitudes du sujet empirique; reste que ces connaissances font partie de notre encyclopédie, au même titre que d’autres. Doit-on alors considérer qu’elles font partie de l’encyclopédie du lecteur empirique mais pas du Lecteur Modèle, et que celui-là doit tendre à s’identifier avec celui-ci ? Eco insiste sur le fait que par « coopération textuelle », on ne doit pas entendre la saisie des intentions du sujet empirique de l'énoncé , mais l’actualisation des intentions « virtuellement contenues dans l'énoncé ». Si l’intention de l’auteur empirique reste parfois incertaine, faute de documentation, et peut faire, en conséquence, l’objet de conjectures hasardeuses, on ne voit pas très bien au nom de quel principe épistémologique l’interprète, à partir du moment où son encyclopédie contient certaines informations relatives à l’intentio auctoris, ne devrait tenir aucun compte du point de vue de l’auteur empirique sur son œuvre. Le fait que l’auteur empirique ne détienne pas la « vérité » de l’œuvre, qu’il ne soit qu’un interprète parmi d’autres, et peut-être pas le plus éclairé, n’implique pas nécessairement qu’il faille à tout prix lui « couper la parole » pour entendre le texte.Le concept problématique d'intentio operis introduit dans I limiti dell'interpretazione (1990) exprime l'idée d'une totale autonomie du texte qui, d'une part, s'est affranchi de la dépendance originaire vis-à-vis de l'auteur (un mouvement sans retour) et, d'autre part, résiste aux possibles abus de l'intentio lectoris.
year | journal | country | edition | language |
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2015-01-01 |